Atelier Mémoire et Citoyenneté

Ce mardi 11 avril, Yaron Kaufman et son épouse, accompagnés de Robert, leur ami et interprète, sont venus à la rencontre des élèves de l’atelier Mémoire et Citoyenneté du collège Gambetta. Arrivés à Paris depuis les États-Unis il y a quelques jours, ils ont tenu à voirles collégienspour leur faire part de leur admiration et du très vif intérêt de toute la famille Kaufman (les trois garçons de Claire et ses 11 petits-enfants) pour tout letravail entrepris. Claire a en effet peu confié à ses garçons sa tragique histoire. Ce n’est que sur l’insistance de Gil, le deuxième de ses garçons, qu’elle a consenti à témoigner devant une caméra de la fondation Spielberg, pour que ses petits-enfants sachent. Mais Claire a emporté avec elle beaucoup de fragments de son enfance, aussi les recherches opérées dans lecadre de l’atelier sont-elles très importantes pour l’ensemble de la famille. Le fait par exemple que nous ayons découvert que le père de Claire n’a pas été assassiné à Auschwitz, ainsi que cela est toujours indiqué, que ce soit à Paris, à Jérusalem (Yad Vashem) ou à Washington (musée de l’Holocauste), mais qu’il fut sélectionné lors d’une halte du train et envoyé sur un chantier, si bien qu’on le retrouve enregistré plus tard en Basse-Autriche ; cette annoncestupéfait la famille. Yaron nous a confié avoir passé la dernière nuit à échanger à ce sujet avec son frère Gil…

La famille, dispersée entre Israël et les États-Unis, suit avec beaucoup d’attention les progrès de l’atelier. Les premiers résultats ont provoqué à des milliers de kilomètres de Carentan des réactions en chaîne qui font plaisir à considérer : une cousine retrouve ses petits-cousins, des petits enfants envisagent de venir dans la Manche, d’y organiser une cérémonie familiale... A l’occasion de cette magnifique rencontre, les collégiens ont encore mieux saisi l’importance de leur travail historique et mémoriel. Grâce à leurs efforts, à leur persévérance et à la rigueur de leurs recherches, des descendants de Claire trouveront des réponses aux nombreuses questions qu’ils se posent encore. Les voilà investis d’une lourde mais noble mission. Pour contribuer au financement des déplacements des élèves de l’atelier, Yaron Kaufman et son épouse ont fait un don financier très généreux au Foyer socio-éducatif du collège.

A l’issue de plus d’une heure d’échanges, nos visiteurs ont pris le chemin de Cherbourg pour se recueillir devant le Mémorial départemental de la Shoah, inauguré en octobre 2020 - grâce au travail mené depuis 2011 au collège Gambetta -, et sur lequel figurent les noms de Wladimir, Maria et Marc Grunberg, grands-parents et oncle de Yaron. Le professeur qui encadre l’atelier les a retrouvés en fin d’après-midi à Saint-Sauveur-le-Vicomte, ville où la famille Grunberg habitait et fut arrêtée, avant d’être déportée en 1942. Accueillis par une amie de la famille, ancienne camarade d’école de Claire, ils ont prolongé les échanges puis sont allés sur des lieux fréquentés par la fillette : son école primaire, la maison où elle fut recueillie par M. et Mme Jouan qui seront reconnus Justes parmi les nations par Yad Vashem d’ici à quelques années, nous n’en doutons pas ; la maison qu’habitait Claire, avec ses parents et son frère jusqu’en octobre 1942, a été détruite dans les combats de la Libération. Aucune nouvelle construction n’est venue la remplacer. Constatant que les noms des trois membres de la famille Grunberg morts en déportations ne figurent pas parmi les victimes civiles inscrites sur le monument aux morts de Saint-Sauveur-le-Vicomte, la famille et l’enseignant espèrent voir réparer une injustice et, par leur ajout, annihiler l’œuvre désastreuse du temps et de l’oubli.

Cette rencontre exceptionnelle, organisée la veille pour le lendemain, littéralement, fut de l’avis de tous, adolescents et adultes, un moment chaleureux et émouvant qui donne tout leur sens aux recherches conduites depuis plus de dix années au collège Gambetta.